3 - Sortir de toutes les formes de jugements

Nous sommes Un sur un certain plan, 
tout jugement divise ce corps collectif

                                                                                                                                                    Article écrit en avril 2021
« Les conflits qui se manifestent dans l’histoire du monde sont d’abord ceux qui se vivent à l’intérieur de chacun... Le monde n’est constitué pour l’essentiel que de la projection de ces mondes intérieurs multiples et contradictoires ».
Cette citation de Jean-Yves Leloup inspire ce partage sur l’un des enjeux spirituels majeurs des mutations actuelles. Cet enjeu se joue dans le plan de l’invisible et est beaucoup plus fécond qu’on ne peut l’imaginer : il s’agit d’un appel à quitter toutes formes de jugement qui créent de la séparation et de la division, alors que seule l’Unité nous permettra de traverser cette transition.

Comme évoqué dans l’article les-trois-plans-que-chaque-personne-porte-elle, l’humanité, la création est Une. La spiritualité, comme la physique quantique, nous disent cette unité. Par conséquent, toute pensée ou toute parole de jugement divise le corps collectif, co-crée les guerres, les intégrismes, les divisions… 
Paul, dans l’évangile, évoque cette image du corps qu’est l’humanité, et le Christ l’exprime souvent, entre autres lorsqu’il dit « ce que vous faites au plus petit d’entre les miens, c’est à moi que vous le faites ».
 
Ne pas juger n’empêche pas d’être lucide sur la dimension blessée et conditionnée de notre dimension humaine. Au cours de mes rencontres, je peux voir les conséquences des blessures et des conditionnements individuels et collectifs vécus, et ceci sans jugement. Et sans que cela ne m’empêche de voir la dimension d’être au-delà de ces conditionnements.
Pour cela il suffit d’avoir fait le même chemin intérieurement, c’est-à-dire d’avoir exploré et accueilli ses propres zones d’ombre et ses propres conditionnements, sans se juger, ce qui est une condition nécessaire à la guérison. J’ai suffisamment exploré et apprivoisé mes propres parts d’ombre pour ne plus avoir envie de juger qui que ce soit.   
 
Ne pas juger n’empêche cependant pas de trancher. Le Christ nous y invite : que votre oui soit oui, et que votre non soit non. Juger, c’est créer une frontière entre la personne jugée et la personne jugeant, c’est considérer que l’autre est dans le mauvais camp, ce qui sous-entend que moi je suis dans le bon camp. Alors que trancher, c’est avant tout un chemin d’unité intérieure ou je décide qui je laisse régner en moi : l’ego ou ma nature divine.  
Trancher, c’est dire un oui inconditionnel à l’amour et à l’unité, et donc dire non à tout ce qui en moi s’identifie à des pensées égotiques qui délimitent mon territoire, en réaction à l’autre vécu comme un danger, créant ainsi des frontières.

A partir de là nous pouvons dire non à certaines pratiques de consommation, non à l’utilisation de certains médias, non à certains discours politiques, non aussi à certaines relations que l’on sent nocives, non à certaines croyances limitantes…, sans pour autant juger ce à quoi on dit non. Il s’agit de choisir la vie, l’amour, la lumière, la tendresse, l’unité… et donc de dire non aux pensées de séparations et de divisions. 
 
Chaque fois que nous choisissons de ne pas juger, mais juste de dire oui à l’amour, à la beauté, à l’unité au-delà des apparences… et non à toutes les pensées, paroles et actes de séparation, alors nous soignons le monde. Posture apparemment non efficace mais en fait profondément féconde…

Mère, la compagne spirituelle de Sri Aurobindo, exprime aussi à sa manière ce Corps collectif, comme l’ont fait de nombreux mystiques : « j’ai une curieuse impression d’une espèce de trame, de trame avec des fils… comme très lâches, c’est-à-dire pas serrés, qui unit tous les événements, et si on a le pouvoir sur une des trames, il y a tout un champ de circonstances qui en apparence n’ont rien à voir les unes avec les autres,mais qui sont liés là, et dont l’une nécessairement implique l’existence de l’autre. Ce sont des circonstances dépendantes les unes des autres d’une façon tout à fait invisible extérieurement, qui n’a pas de logique mentale, mais qui sont comme liées les unes aux autres. Si l’on est conscient, vraiment conscient de cela, c’est comme cela qu’on peut changer les circonstances. On touche un coin et tout bouge ».